Je fais un peu ma Maya tiens
vendredi 24 mars 2006, 15h34
La crise française vue de l'étranger
PARIS (AP) - Vue de l'étranger, la crise française autour du contrat première embauche (CPE) apparaît selon certains médias comme un réveil salutaire de l'opinion publique, notamment de la jeunesse, et un exemple à suivre. Pour d'autres, il s'agit d'un combat d'arrière-garde de la part d'un pays accroché à un modèle obsolète.
Pour le "Los Angeles Times", "c'est le printemps et les Français reprennent les émeutes". "Une fois encore, les étudiants sont sur les barricades en France", alors même que "si (...) la loi est abrogée, (...) le chômage des jeunes restera élevé ce qui provoquera évidemment davantage d'émeutes".
"La France a plus de mal que les autres pays européens à adopter une économie mondialisée, largement parce que les Français préfèrent imputer leurs problèmes au 'capitalisme anglo-saxon' plutôt que d'examiner leurs politiques d'échec", analyse le grand journal de la Côte Ouest. Dans ces conditions, Dominique "de Villepin, qui paie un lourd prix politique pour du bon sens, devrait tenir bon. La loi sur le travail des jeunes ne va pas assez loin mais c'est un début".
Le quotidien libéral allemand "Frankfurter Allgemeine Zeitung" stigmatise aussi cette "tendance à protéger les acquis, plus répandue en France que dans les autres pays européens". Il y est "presque impossible pour les employeurs de licencier quelqu'un", écrit quant à lui le "New York Times", tandis que le "Chicago Tribune" dénonce un "système calcifié" dans lequel le CPE "tente d'introduire un peu de flexibilité", "non pour punir les jeunes, mais pour inciter les employeurs à parier sur eux". Et le quotidien de lancer "qu'"un emploi à vie ne signifie pas grand-chose quand on ne trouve même pas d'emploi".
En Chine aussi le "Quotidien du Sud" juge "de plus en plus inutile d'opposer au défi de la mondialisation l'esprit révolutionnaire et l'action 'à la française'". Car "avec la mondialisation, un pays fortement protectionniste ne peut pas connaître la prospérité sur le long terme".
Le Japonais "Nihon Keizai Shimbun" se déclare quant à lui "inquiet de la prolongation des troubles et de son impact sur l'économie", mais il voit également dans la crise l'effet des ambitions présidentielles du Premier ministre français et de son passage en force sur le CPE. Du coup, "l'activité démocratique qui consiste à exiger du gouvernement l'amendement de la loi s'avère être une révolution pour dire 'non' au gouvernement'".
Les acteurs de la confrontation "gardent toujours à l'esprit le fait que l'élection présidentielle de l'an prochain pourrait être déterminée par l'issue de cette bataille, écrivait l'éditorialiste de l'"Irish Times" le 17 mars, estimant que "les deux camps se mobilisent pour s'assurer de ne pas perdre prématurément" ce scrutin.
Certes, note le "Frankfurter Allgemeine", "les événements s'inscrivent dans la continuité du résultat désastreux pour Chirac du référendum sur la Constitution européenne et des violences dans les banlieues", mais si "le règne de ce président s'achève en fiasco, c'est seulement un symptôme de la crise plus profonde dans laquelle se trouve la France". La France est "un pays en guerre avec lui-même", diagnostique le quotidien britannique de gauche "The New Statesman".
Mais certains se félicitent de cette mobilisation, comme le Suédois "Aftonbladet" (social-démocrate), cité par l'hebdomadaire "Courrier international". Il souligne que le Parlement de Stockholm débat d'une proposition semblable au CPE, et s'insurge contre ce projet qui fait de "la sécurité de l'emploi, cette plate-forme pour le bien-être dans la vie, (...) un objet rare, voire un luxe".
Le plus enthousiaste est "Eleftherotypia", pour qui "les étudiants français envoient un message qui traverse les frontières et s'adresse à nos dirigeants (grecs) qui prévoient de mettre en oeuvre une politique de rigueur néolibérale". "Grâce au message des Français, les jeunes Grecs se sentent prêts à lutter à leur tour contre les manigances des politiques sur le plan social", conclut-il. AP
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